L'idée de transformer les "déchets" verts, issus notamment de l’agriculture, en biométhane, un gaz 100% renouvelable qui peut chauffer nos maisons et faire rouler nos bus, séduit de plus en plus. Et ça tombe bien car la loi de Transition Énergétique pour la Croissance Verte fixe à 10% la consommation de gaz renouvelable à l’horizon 2030, objectif auquel la méthanisation contribue d’ores et déjà (à hauteur de 5% actuellement).
En effet, produire une énergie renouvelable en générant un revenu supplémentaire substantiel, le monde agricole y est largement favorable.Eric Fallou est agriculteur en Eure-et-Loir et préside la fédération des producteurs de plants de pomme de terre. Se lancer dans la méthanisation, il y songe depuis longtemps : « Moi, depuis 5 ans à peu près, j'ai dans l'idée de faire une production de biométhane sur ma parcelle. » Pour son confrère Sylvain Leroy, qui mutualise son projet avec d’autres agriculteurs et agricultrices, c'est aussi une réponse pratique aux défis du quotidien : « Le méthaniseur nous offre l'opportunité de pouvoir mettre dedans les mauvaises herbes qui poussent en quantité sur nos parcelles et de produire du biométhane. »
Methaboost, un programme pour les “entrepreneurs agriculteurs”
Si l'envie est là, et que la technologie existe, le passage à l'acte n'est pourtant pas si simple. Investissement XXL, normes, recrutements… Mettre sur pied un site de méthanisation peut ressembler à un parcours du combattant. C'est là que Methaboost prend tout son sens. Lancé par GRDF, Natran et le Campus Les Champs du Possible, ce programme de formation gratuit doit booster la production de biométhane en France.
Marina Masseau, présidente du Campus Les Champs du Possible, explique la genèse du programme : « Methaboost est né d'une concertation grand public [...] pour vulgariser un sujet. On s'est dit : si on développait un programme Methaboost, est-ce que ça aurait du sens ? [...] pour accompagner les agriculteurs dans leur dynamique de projet. »
Philippe Metais, chef de projets R&D innovation et chargé de développement biométhane Provence Alpes-Côte d’Azur, insiste sur le terreau fertile qui a permis cette innovation : « Ce qu'on oublie un peu, c'est tout le travail préalable qui a permis l'émergence de cette idée sur le territoire, qui est la création du Living Lab. » Lancé dès 2019 en partenariat avec la Région Centre-Val de Loire et le Campus, ce Living Lab a « vraiment ancré un fonctionnement de collectifs citoyens, qui a fait un peu grandir tout le monde sur le sujet de la transition agro-écologique. »
C'est cette dynamique collaborative qui a naturellement conduit à Methaboost, appliquant la même approche d'incubation, mais cette fois pour des « entrepreneurs agriculteurs ». Il ajoute que ce Living Lab a aussi été crucial pour « travailler sur l'acceptabilité sociétale » et aider les porteurs de projet à mieux répondre aux interrogations des citoyens, transformant le scepticisme en intérêt, voire en désir de participation.
Multiplier par 5 la production de biométhane
La nouveauté, c'est donc cette formation dédiée de 18 mois, lancée en 2024. Pour sa première session, 15 agriculteurs, porteurs de six projets, ont été outillés au Campus Les Champs du Possible, un lieu où « l'agriculture du futur s'invente ». Maïwen Janovet, directrice de Methaboost, insiste : « L'idée, c'est que quand on est porteur d'un projet de site de méthanisation et qu'on n'a pas les clés, on peut désormais se former. » Le programme décortique tout : les types de déchets à utiliser, la jungle réglementaire, comment bien présenter son projet à son entourage. En clair, « comment on ouvre ces portes, comment on lève ces freins », précise-t-elle.
Et ça marche mieux à plusieurs ! « On est sept dans le groupe, éleveurs et céréaliers, on forme une bonne complémentarité, une bonne dynamique », témoigne Sylvain Leroy. Fini de se sentir seul face à l'ampleur du projet. Eric Fallou abonde : « Vu les sommes qu'on engage, on ne peut pas faire ça à la légère, d'où l'importance d'être formé. La formation était complètement salutaire ! »
Cette montée en compétence des agriculteurs est cruciale pour GRDF. Jean-Michel Vappereau, délégué territorial Eure-et-Loir, souligne l'ambition de GRDF : « 20% de biométhane en 2030 », soit multiplier par cinq la production actuelle ! Avec déjà plus de 700 sites en France, l'enjeu est de taille. Pour lui, « autant produire localement, proprement, en faisant bénéficier les agriculteurs. »
Methaboost est donc une réponse à une demande en plein boom. Une formation qui démystifie la méthanisation et donne aux agriculteurs les outils pour devenir des acteurs majeurs de la transition énergétique. Et le succès est au rendez-vous : une deuxième promotion est en cours. Le modèle s'apprête à essaimer sur tout le territoire. Comme le dit Marina Masseau, c'est « cette intelligence collective » qui fait la différence.
Pour en savoir plus ou bien s’inscrire à la prochaine session de formation, c’est ici :